dimanche 4 octobre 2009

Le soleil des Scorta

Roman adultes
Le soleil des Scorta

Laurent Gaudé
Actes Sud, 2004 - 246 p.

Note : 5/5

Quatrième de couverture : Parce qu'un viol a fondé leur lignée, les Scorta sont nés dans l'opprobre. A Montepuccio, leur petit village d'Italie du sud, ils vivent pauvrement, et ne mourront pas riches. Mais ils ont fait vœu de se transmettre, de génération en génération, le peu que la vie leur laisserait en héritage. Et en dehors du modeste bureau de tabac familial, créé avec ce qu'ils appellent "l'argent de New York", leur richesse est aussi immatérielle qu'une expérience, un souvenir, une parcelle de sagesse, une étincelle de joie. Ou encore un secret. Comme celui que la vieille Carmela - dont la voix se noue ici à la chronique objective des événements - confie à son contemporain, l'ancien curé de Montepuccio, par crainte que les mots ne viennent très vite à lui manquer.
Roman solaire, profondément humaniste, le nouveau livre de Laurent Gaudé met en scène, de 1870 à nos jours, l'existence de cette famille des Pouilles à laquelle chaque génération, chaque individualité, tente d'apporter, au gré de son propre destin, la fierté d'être un Scorta, et la révélation du bonheur.


C'est l'histoire d'une famille marquée par la malédiction et l'opprobre, une famille dont les membres sont voués à n'être que des "culs-terreux", des misérables, et où il n'existe qu'une seule vérité : la valeur de la sueur. Mais c'est aussi l'histoire de cette fierté des habitants de ce petit village de l'Italie et l'idée que rien n'importe plus que la famille.
« Tu n'es rien, Elia. Ni moi non plus. C'est la famille qui compte. Sans elle tu serais mort et le monde aurait continué de tourner sans même s'apercevoir de ta disparition. Nous naissons. Nous mourons. Et dans l'intervalle, il n'y a qu'une chose qui compte. Toi et moi, pris seuls, nous ne sommes rien. Mais les Scorta, les Scorta, ça, c'est quelque chose. » [pp.144-145]
C'est cette fierté qui se transmet de génération en génération. Et puis ça ressemble un peu à Cent ans de solitude (toutes proportions gardées, bien entendu, hein...n'égratignons pas le Chef-d'œuvre du Maître !) : l'histoire d'une famille, une histoire qui se répète de génération en génération, la fierté et la force de ses membres, l'amour, l'appréhension de la malédiction, les superstitions, les curés qui n'en sont pas vraiment...

Et puis il y a cette chaleur accablante. On sent le soleil frapper fort sur notre nuque, on sent la transpiration dégouliner le long de l'échine, on crève de soif, nos mains nous paraissent calleuses par le trop de terre retournée, de tomates ou d'olives récoltées...

Je suis entrée toute entière dans ce roman comme il y a fort longtemps que ça ne m'étais plus arrivé. J'ai ressenti leurs peines, leurs joies, leurs douleurs, leurs passions et leurs craintes... J'étais avec eux, le long du chemin poussiéreux sur lequel la pluie n'était plus tombée depuis de trop longues années... J'étais, moi aussi, devenue une Scorta.

→ Prix Goncourt 2004


Aucun commentaire: